Genre : Comédie dramatique
Durée : 92’
Acteurs : Isabelle Carré, Bernard Campan, Mounir Amamra, Eric Viellard, Olivier Claverie, Geneviève Mnich...
Synopsis :
Divorcé du genre bourru, Jacques tient seul une petite cave à vins, au bord de la faillite. Hortense, engagée dans l’associatif et déterminée à ne pas finir vieille fille, entre un jour dans sa boutique et décide de s’inscrire à un atelier dégustation...
La critique de Julien
En mars 2019, la pièce de théâtre "La Dégustation" battait son plein au théâtre de la Renaissance, à Paris, avant que la pandémie en décide autrement, annulant d’autant plus la tournée qui devait s’en suivre. Or, si les théâtres étaient à l’arrêt, les plateaux de cinéma, eux, ont pu continuer à fonctionner, mais sous certaines strictes conditions. C’est à ce moment-là que les acteurs principaux de ladite pièce, Isabelle Carré et Bernard Campan, ont eu l’idée de demander à leur metteur en scène, Ivan Calbérac, d’adapter son scénario pour le cinéma. Et voilà qui est désormais chose faite, avec "La Dégustation"...
Après avoir déjà adapté pour le cinéma - mais dans un autre contexte - ses pièces de théâtre "L’Etudiante et Monsieur Henri" et "Venise n’est pas en Italie", l’auteur a donc accepté de transformer sa pièce en film, tout en évitant le théâtre filmé, et en sortant donc du décor unique, développant ainsi tout ce que le texte évoquait sans le montrer. Pour le besoin du cinéma, Ivan y a également incorporé de nouveaux personnages secondaires à son histoire, en plus des cinq qui composaient sa pièce initiale, lesquels sont toujours interprétés par les mêmes acteurs, dont Éric Viellard, Olivier Claverie et Mounir Amamra (le frère de l’actrice Oulaya Amamra et de la réalisatrice Houda Benyamina). Alors qu’il était initialement question d’une rencontre de plusieurs personnes d’horizons différents, chez un caviste, autour d’une bonne dégustation de vin, cette comédie romantique aux rouages bien connus nous emmène à la rencontre d’Hortense et de Jacques, respectivement donc joués par Isabelle Carré et Bernard Campan, soit deux êtres qui cachent en eux de profonds maux, leur empêchant alors de leur donner une chance en amour. Il y a, d’une part, Hortense, une sage-femme et célibataire coincée, engagée dans l’associatif, qui cherche à avoir un enfant par PMA, elle qui est la fille d’une catholique très stricte, et qui va alors trouver dans le rouge une forme d’exultation. De l’autre, Jacques, caviste, veut oublier ce qui le ronge de l’intérieur, par la consommation de boisson, sauf que celle-ci va nuire davantage à sa santé. Mais c’est sans compter donc sur une bonne bouteille de rouge, élément déclencheur d’un travail psycho-affectif qu’ils vont effectuer sur eux-mêmes (dans la partie sobre de leur processus de guérison personnelle)...
Récompensé du Molière 2019 de la meilleur comédie, "La Dégustation", version cinématographique, ne joue pas exactement dans la même cours que son modèle, empruntant même un chemin bien plus dramatisé. Cependant, certaines répliques, assez goûtues (Jacques, en parlant de lui : "On ne me grille pas, moi ; je ne suis pas un toast, bien qu’il m’arrive d’être beurré..."), laisse deviner qu’elles sont empruntées directement des dialogues de la pièce de théâtre. Le franc-parler beau parleur du second rôle de Mounir Amamra (Steve, un jeune en réinsertion) ne ment d’ailleurs pas sur la marchandise, bien que son segment narratif soit stéréotypé, mais au même titre finalement que les autres. En effet, on devine très facilement les aboutissants de ce gentil petit film. Prévisible, la rencontre entre ses deux personnages principaux diamétralement opposés laisse alors place à de la tendresse, à une porte ouverte vers la paix intérieure, et le partage, même s’il faudra au personnage - bougon - de Campan la nécessité de sortir de sa carapace. Le film d’Ivan Calbérac suit alors une trame assez convenue, bien qu’il compte sur la générosité et l’humanité sincère de ses interprètes, elle qui se ressent aussi au travers de l’étrange titre "Uman" signé Romain Vignes, un jeune auteur-compositeur qui n’avait encore rien enregistré auparavant en studio. Chanté dans une langue inventée, ce titre reflète ainsi nos parts d’ombres et de lumières, elle qui est censée créer en nous une forme de consolation, que "La Dégustation" aurait d’ailleurs très bien pu porter comme titre...